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lundi 18 mars 2013

Les tranches de vie d’Elie Semoun à Tel Aviv

Jeudi soir 14 mars, l’humoriste Elie Semoun se produisait pour la première fois en Israël au Bet Hahayal de Tel-Aviv où il présentait son spectacle intitulé « Tranches de vie ». Le public français et francophone était au rendez-vous. La grande salle était comble, comblée, applaudissant copieusement à la fin de chacun de la bonne douzaine de sketches bien rôdés et rappelant l’artiste à l’issue de sa prestation. Les spectateurs ont pu découvrir deux Elie Semoun.
Le premier, celui qu’on a envie d’appeler par son petit nom, est un garçon charmant, bien élevé, de bonne composition, fin, délicat, presque fragile, dont on deviendrait très volontiers l’ami si le hasard des rencontres décidait de rapprocher les itinéraires. C’est l’Elie Semoun qui avoue se plaindre et gémir après s’être abîmé un genou. C’est le même Elie plein de pudeur et d’autodérision quand il parle des quinqua qui passent et des générations suivantes qui montent et se moquent… C’est encore cette silhouette un peu gênée qui arpente la scène de façon compulsive quand il se sent obligé d’évoquer l’ancien et long compagnonnage avec Dieudonné dont on reparlera.


Et puis il y a l’autre, celui qu’on a envie d’appeler par son nom de famille, la bête de scène, le sportif des planches à la mesure de son corps et de ses voix, l’acteur trépidant dans ses personnages, le clown mobile comme du vif-argent, le one-man-orchestre qui dans son show mime, contrefait, désarticule, s’époumone. Et on a envie de dire bravo l’artiste et on dit bravo l’artiste, sauf qu’on ne peut pas s’empêcher de penser qu’il est le produit, lui comme d’autres, d’un star système ultra – libéré et triomphant qui tire sa substance d’une société en perte d’identité et en pleine décomposition, société qui, depuis au moins deux décennies brise rageusement tous ses tabous, piétine ses valeurs morales les plus fondatrices et ruine une par une les institutions qui ont fait de la France un pays respecté et admiré. Et bien loin de la grande tradition classique française qui s’attachait à plaire et à divertir tout en instruisant, la cohorte des amuseurs dont il fait partie s’inscrit dans l’hubris, libère la parole, démolit les codes moraux et sociétaux, pratique l’outrance et sombre parfois dans l’outrage. Dès lors tout y passe : les femmes, les aveugles, les nains, les jeunes, les vieux, les médecins, la mort, les sexuels (trans, homo, hétéro), les camés, la Shoah… non pas la Shoah, il n’en a pas le cœur et M’Balabis s’en charge !



 Quant au fameux compagnonnage de Semoun avec ce dernier, il constitue moins une erreur de jeunesse ou de début de carrière que la cristallisation d’un état symptomatique de la période mitterrandienne au cours de laquelle on prônait, de la base au sommet et lors d’aveuglements collectifs dont à l’époque on avait le secret, le multiculturalisme à tous crins et la société de tous les mélanges tandis qu’on faisait mine de croire que la main jaune « Touche pas à mon pote » de SOS Racisme avait définitivement effacé le souvenir sinistre d’une étoile de même couleur. C’est aussi cela, parfois de façon claire, parfois de façon subliminale que l’humoriste Elie Semoun est venu suggérer au public de Tel-Aviv. Dire que nous n’avons pas ri serait mentir. Nous avons ri, et même beaucoup, mais notre rire était jaune.


 Samuel Nathan

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